Baye Fall Paname
Des faïences de la mosquée aux façades Parisiennes…
J’ai rencontré les Baye Fall, pour la première fois, dans l’église Catholique de mon quartier, dans le 18ème arrondissement de Paris.
Je n'imaginais pas, qu'à partir de cette soirée là (voir série Nuit Mouride), je plongerai dans l’univers de cette communauté Musulmane, originaire du Sénégal. J’ai pu documenter différents types de cérémonies : Magal, Thiants, Ndogou, Safar…afin d’explorer le rapport entre tradition et modernité qui s’y joue. Comment les confréries Mourides et Baye Fall vivent-elles leur spiritualité dans un cadre qui, à première vue, leur est étranger : Paris ?
La communauté Mouride, née au Sénégal autour de la figure du Cheikh Amadou Bamba (1853-1927), est l’un des grands courants de l’Islam soufi en Afrique de l’Ouest. En son sein, les Baye Fall, disciples du Cheikh Ibrahima Fall (lui même disciple d'Amadou Bamba), représentent une branche connue pour son ascèse, sa dévotion. Elle se distingue par la centralité du travail comme voie spirituelle et par un attachement fort à la confrérie et à ses guides. Les Baye Fall se reconnaissent à leurs tenues aux patchworks colorés (Ndiakhass), leurs chants et rythmes percussifs. Ils se distinguent des Mourides par une pratique de l'Islam plus libre, remplaçant certains piliers (prières, jeûne) par le travail et le service, dans une spiritualité très incarnée, vivante et populaire.
À Paris, capitale mondiale où se croisent des diasporas multiples, les Baye Fall et Mourides ont trouvé un terrain pour prolonger et réinventer leurs coutumes. Plusieurs semaines avant le Magal, ils investissent les rues du 18ème arrondissement et défilent au rythme des mélodies sacrées, sous le regard curieux et enthousiaste des habitants du quartier. Les espaces de prière et de rassemblement, souvent installés dans des maisons ou des centres Islamiques associatifs, deviennent des foyers de transmission spirituelle. Les grandes fêtes religieuses, comme le Magal, ont lieu dans des grandes salles louées pour l'occasion, et réunissent la diaspora venue de toute la France dans une atmosphère de ferveur, où se mêlent chants, prières et repas partagés.
Être Baye Fall, c'est faire partie d’une vie communautaire tournée vers le spiritualisme et l’entraide, mais c’est aussi une philosophie de vie qui met l'accent sur la fraternité, l'ouverture et la bienveillance.
Ce travail photographique explore la présence et la vitalité des communautés Mourides et Baye Fall, dans la façon dont ils s’approprient l’espace Parisien, en y inscrivant leurs signes, leurs rythmes et leur mémoire. Plus qu’un simple déplacement géographique, c’est une véritable négociation entre tradition et modernité, où l’héritage spirituel dialogue avec la métropole contemporaine. Entre fidélité et adaptation, cette série met en lumière une identité en mouvement, une énergie qui relie Touba à Paris, la mémoire au présent, l’intime au collectif.